Last Updated on 9 June 2024 by Marc Munier
Bonjour à tous, aujourd’hui j’ai le plaisir d’avoir sur la chaine Claire Berthier, gérante action* chez Trusteam Finance. Ensemble on va parler de plein de choses très intéressantes, et avant ça je vous invite à cliquer sur le bouton “s’abonner” comme ça je vous avertirai dès que je mettrai en ligne une vidéo..
*Update 2023 : Claire Berthier est aujourd’hui CEO de Trusteam Finance
MARC – Claire Berthier, bonjour.
CLAIRE BERTHIER- Bonjour Marc.
Merci d’être là. Alors qu’est-ce que Trusteam Finance ? Est-ce que tu peux nous présenter un peu ta société de gestion ?
Trusteam Finance est une société de gestion entrepreneuriale qui a été fondée en 2000 et qui depuis 2010 est centrée sur un élément clé des entreprises : le client et sa satisfaction. Donc en fait on a une société de gestion d’environ 25 personnes. On gère un peu plus d’un milliard d’euros. On a une gamme de fonds diversifiée, des fonds très prudents comme Trusteam Optimum jusqu’à des fonds d’actions Small Cap. Moi je suis gérante actions sur le fonds Trusteam ROC et Trusteam ROC Europe, donc des fonds monde et européens.
Tu as parlé de la partie principale de votre société qui est le client, alors une question assez basique, est-ce que le client qui achète et qui est satisfait suffit pour avoir une bonne entreprise ?
De un, une entreprise sans client n’existe pas. Vaut mieux les garder, vaut mieux les satisfaire. Et il vaut mieux avoir un actif client de qualité. Et deux, comme c’est le point central et qu’en tant qu’investisseur on ne peut pas forcement être au courant de tout, car les entreprises c’est comme de grosses boites noires, on a décidé de se concentrer sur un élément principal et surtout un élément qu’on peut mesurer.
En tant qu’investisseur, il est très important de voir les éléments qui sont externes à une entreprise, de regarder si ces informations ne sont pas biaisées par celle-ci, si c’est de l’information claire, sincère et comparable. Et ce sont tous ces éléments qui nous permettent de prendre de bonnes décisions rationnelles.
Il nous a donc semblé que la première des choses à regarder c’était l’actif client. Mais comment le mesurer ? Comment faire pour avoir une vision extérieure la plus objective possible, la plus rationnelle possible ? C’est en allant demander directement aux clients ce qu’ils pensent de la société qu’on arrive donc à mesurer leur satisfaction.
Vous basez donc principalement votre approche sur cette satisfaction client, et comment procédez-vous, vous vous appuyez sur des Survey ?
Alors en fait, ça nous a pris quelques années puisque que Trusteam a été créée en 2000. Et c’est depuis 2007 qu’on réfléchit au processus qu’on améliore en permanence. C’est donc depuis cette idée de connaître absolument l’actif client d’une entreprise, qu’on a édifié un processus qui se déroule en trois étapes. Effectivement regarder ces données externes, identifier le client, connaître sa voix, son avis, ne suffit pas. Car pour nous ce n’est qu’un élément pour distinguer les meilleures entreprises, il y a aussi l’étude de l’entreprise pour savoir si c’est un coup de bol ou si c’est vraiment sa nature, son ADN d’être tournée vers son client. Et après on fait bien sûr une analyse financière.
Par rapport aux clients, on sait que vos fonds sont labellisés ISR enfin pas tous mais en tout cas certains…
Quasiment tous. Tous les fonds commercialisés sont labellisés.
Donc ISR c’est “Investissement Socialement Responsable“, alors quel est le lien justement avec l’aspect client qui n’est pas forcément évident ?
Pour nous une entreprise centrée sur ses clients est une entreprise ouverte, qui écoute et qui va réellement évoluer avec les pratiques actuelles et en fonction des attentes des clients. Et ce qu’on voit depuis une dizaine d’années, c’est que les clients veulent réellement acheter des produits avec une empreinte qui respecte la planète, qui respecte les salariés et qui minimise les aspects négatifs pouvant exister dans une entreprise.
On voit donc une réelle corrélation entre d’un côté des clients satisfaits et le fait que l’entreprise respecte l’environnement, respecte ses salariés et respecte des critères de gouvernance plus larges. Pour nous c’est vraiment quelque chose qui ne va pas l’un sans l’autre. Donc on sait que la satisfaction client a un lien direct avec la performance financière. On sait aussi maintenant que la satisfaction client a un lien direct avec la performance extra financière.
Donc vous vous basez sur le fait que le client ait aussi une conscience citoyenne et va se diriger vers les entreprises qui sont durables par exemple.
Sur le fond on se dit qu’une entreprise qui est capable d’écouter ce que veulent ses clients, elle sera capable d’écouter leurs attentes environnementales. Donc effectivement si on reste sur ce pilier là – le pilier environnemental -, celles-ci ont énormément évolué ces dernières années. Il est donc essentiel pour faire des produits vertueux qui collent à leurs attentes, de les connaitre, de les respecter pour s’améliorer.
Ensuite il est important de mentionner que derrière il y a une deuxième dimension. Il n’y a pas seulement les produits, il y a aussi la réputation. Une entreprise qui ne respecterait pas, qui polluerait ou qui aurait des scandales d’un point de vue environnemental ou de corruption, qui ne ferait pas attention à être une entreprise citoyenne aurait une répercussion négative sur sa réputation. Et in fine sur l’image qu’ont ses clients, sur leur volonté d’acheter, sur leur volonté d’être satisfaits donc sur leur satisfaction. Et enfin sur la performance financière et boursière de cette entreprise.
Maintenant on va parler un peu plus de votre approche d’investissement. Quel est ton style ? Il y a du style value, du style croissance et autre… Quelle est ton approche des marchés par rapport à ça ?
Je n’aime pas parler de growth versus value versus autre chose, low vol… Pour nous ce qui est important de regarder quand on investit, c’est l’entreprise. C’est de comprendre comment l’entreprise génère de l’argent, comment est-ce qu’elle génère de la profitabilité. D’où ça vient et pourquoi, et de comprendre les leviers qu’il y a derrière. Et une fois qu’on a bien compris ça et étudié son actif client, on regarde les éléments financiers qui en découlent. La solidité financière de l’entreprise, comment elle se positionne par rapport au marché, quelle est la perception du marché sur la valeur.
Si la perception est égale ça veut dire qu’il y aura une proximité d’investissement qui sera assez limitée. Il y a pas mal de cas où le marché surévalue et donc il y a un risque de surévaluation, ça veut dire que le marché est prêt à payer très cher certaines valeurs et peut-être même trop cher. Et dans ce cas-là on écarte.
Par contre ce qu’on veut et ce qu’on retient c’est quand il y a sous-évaluation, ce qu’on cherche donc c’est les entreprises qui sont solides et robustes, qui ont un actif client de qualité, mais que le marché n’aime pas forcement. Ce genre de cas représente une super opportunité parce qu’on les achète moins cher, et c’est là qu’on crée de la valeur. Il y en assez peu mais on essaye, c’est tout notre travail de faire ça.
Finalement, en terme financier c’est plus du Bottom Up, stock picking on va dire.
Complètement.
Ma question par rapport à ça, est-ce que tu t’occupes des conditions globales macroéconomiques ? Est-ce que tu regardes les choses d’une manière plus globale économiquement parlant ou c’est vraiment one by one ?
Non c’est vraiment des cas d’investissement. On parle vraiment des sociétés, de stock picking. Après il y a l’environnement qui va jouer à la fois dans le business modèle de la société. Comment est-ce qu’elle crée de la valeur, quel est son taux de croissance, quels sont ses taux de marge. Les risques qu’il peut y avoir. On le retrouve donc d’une certaine façon indirectement dans l’analyse micro. Une autre façon dont on regarde c’est par rapport à la perception du marché…
La perception, c’est le prix…
CLAIRE – C’est ce sur quoi le marché va se focaliser. Par exemple les taux d’inflation sur le marché américain. Ce qui est important c’est de voir comment est-ce que réagissent les investisseurs par rapport à une nouvelle. Et finalement de prendre conscience qu’une nouvelle qui pendant une semaine va être perçue de façon très positive, la semaine d’après va l’être négativement. Donc essayer de décrypter la manière dont réfléchit le marché et d’en tirer parti. Mais cela n’est pas possible si à la base on ne connait pas la société.
Alors par rapport à cette sélection de sociétés, que regardes-tu en terme financier ? Quels sont les ratios les plus importants ?
Alors bien sûr l’actif client, son taux de satisfaction, c’est là une donnée que l’on a en interne mais qui n’est pas forcément transposable pour l’investisseur individuel. Par contre ce qu’on peut regarder sur les ratios financiers, bien sûr les ratios d’endettement donc dette nette sur EBITDA pour voir la solidité et la robustesse du bilan afin d’être sûr que la société n’est pas surendettée. Les taux de marges, les taux de croissances, marges d’EBIT EBITDA. On préfère regarder ça plutôt que le résultat net. Du coup en termes de valorisation on va plutôt regarder des multiples d’EV/EBIT ou EV/EBITDA plutôt que de regarder le Price Earning, parce que le résultat net income, vraiment le résultat tout en bas, est sujet à plus de variations externes qui ne sont pas forcément liées à l’opérationnel.
Est-ce que vous faites vous-même des valorisations d’entreprises ? Mettez-vous un prix à chacune ?
Dans l’analyse financière il y a deux choses. Il y a une note de robustesse, pour être sûr que demain l’entreprise sera encore là et qu’elle aura de bons fondamentaux, donc je parlais de la dette, de la structure bilancielle mais aussi des dynamiques d’augmentation de la profitabilité. Et tout ça, c’est à côté de l’analyse et ça ne va pas sans bien sûr l’analyse de la valorisation. La valorisation est un objectif de cours et qu’on se doit de respecter en tant que gérant, car les marchés sont parfois irrationnels et même le gérant l’est lui aussi parfois, en tout cas on a beaucoup de biais. Et se mettre des règles c’est hyper important pour pouvoir rester dans un minimum de rationalité.
On parlera des biais un peu plus loin, et je te poserai une question sur la gestion passive en l’occurrence mais on y reviendra. Plus techniquement par rapport à un portefeuille d’actions comment le diversifies-tu ? Est-ce que tu as des convictions fortes sur des valeurs ? Quelle est la concentration du portefeuille ?
C’est pareil, c’est-à-dire que sur les pondérations il est très important de toujours avoir une approche entre risque et rentabilité. Si un objectif de cours est très élevé ou en tout cas si on a un upside très important c’est souvent le signe que derrière il y a un risque important aussi. On peut donc faire la mesure entre les deux et mettre une pondération très pertinente, surtout quand on se rend compte que l’opportunité qu’on a en termes d’upside est importante et que le risque est moins élevé. Mais c’est vrai que moi j’ai une approche plutôt prudente où j’aurais jamais plus de 5 % du portefeuille sur une valeur. Donc les pondérations varient entre 1% et 3% et quelques fois on va monter à 4% et 5% mais vraiment sur des convictions très fortes où on pense que le risque est plus limité et disproportionné par rapport au potentiel d’upside.
Donc c’est quand même bien diversifié, pas plus de 5% !
Ah oui la diversification est importante, et pour nous c’est une approche qui est très importante car il y a bien sûr notre analyse mais il y a aussi l’incertitude du marché et l’incertitude de la vie en général. Et en tant que gérants on ne regarde pas seulement des marchés financiers non corrélés. Au contraire on est dans un métier où notre job est d’essayer de prendre des décisions sachant qu’on ne connait pas l’avenir et qu’on ne le connaitra jamais. C’est pour cela qu’un minimum de diversification est essentiel.
Par rapport à l’avenir quel est l’horizon de temps, je veux dire quand tu es dans une valeur tu la gardes combien de temps 3 ans, 5 ans, 1 an… ?
Tout d’abord on a comme règle l’objectif de cours. Mais pour moi la situation idéale c’est de ne jamais vendre et d’être sur une société qui correspond absolument à nos critères, qui soit une très belle société, robuste. Donc un bel investissement sur le long terme. Et, oui l’horizon de placement est de 3-5 ans, mais après le mieux c’est de rentrer une valeur et de ne jamais la vendre.
D’accord donc c’est vraiment sur du long terme.
C’est du très long terme et c’est là-dessus qu’on voit la création de valeur et les transformations d’entreprises. Mais le marché est irrationnel et parfois on est obligé de vendre par un objectif de cours évidement ou un management qui change, une stratégie qui évolue. Et donc un environnement qui encore une fois est incertain. Donc il peut y avoir des changements qu’on n’a pas prévu.
Donc là c’était ma question, tu y as répondu en grande partie. Quand te décides-tu à vendre un titre dans un portefeuille ? Il y a deux raisons à cela, il y a celle de vouloir alléger je suppose, et celle de vouloir se débarrasser complètement d’un titre et pour cause, comme tu l’as dit un changement du management, l’objectif de cours ?
Oui, c’est avant tout l’objectif de cours. Après il y a les raisons par rapport au processus, que nous avons restructuré après. Car on a un processus d’investissement qui est très contraignant. Mais quand il y a par exemple une dégradation de la satisfaction client, on allège ou on vend. Quand il y a des raisons extra financières, une controverse qui vient impacter la réputation de l’entreprise, pareil on n’hésitera pas à vendre. C’est donc à la fois des raisons de processus et des raisons financières.
Et par rapport à l’objectif de cours, si vous aviez fixé l’objectif à 50 et que ça atteint 50 en étant sur une bonne tendance haussière, que faites-vous ?
Justement c’est le principe de l’objectif de cours, c’est pour aller contre ces biais-là, parce que quand on est à la hausse – et on est dans ce type de marché en ce moment – on a l’impression que tout va bien et que notre objectif de cours est toujours trop bas. Et le principe de l’objectif de cours et ce pourquoi il faut s’y tenir, est qu’on ne va pas absorber toutes les nouvelles négatives. On va oublier qu’il y a des raisons pour lesquelles les sociétés baissent. Et que ce n’est pas parce qu’aujourd’hui le marché est positif que demain il ne peut pas se retourner. Donc on prend nos gains et on vend : être moins irrationnel que le marché.
Quand il y a des reportings de fonds, souvent on voit pas mal de ratios par rapport aux fonds et par rapport aux sociétés qui sont à l’intérieur. A quoi servent les ratios du type volatilité, Beta, Sharpe, Sortino etc., et est ce qu’il y en a qui ont une caractéristique plus importante que les autres ?
Alors nous, on ne s’en sert pas du tout dans la gestion, encore une fois on est sur de la gestion fondamentale c’est donc pas du tout ce type de ratio qui nous intéresse. Par contre c’est vrai que ce type de ratios sert à nos clients. Il sert en termes d’indicateur de risque, pour vérifier, pour se mesurer dans l’absolu et se mesurer potentiellement face aux concurrents. Donc ces ratios sont nécessaires pour avoir une première idée sur les fonds. Je pense que ce qui est important sur ces ratios pour quelqu’un qui va regarder les fonds, c’est de les comprendre. Et comprendre leur biais et leurs limites. Par exemple, si on prend la vol, la volatilité d’un fonds est une catégorie d’actif… (Rires)… (Par ce qu’on a un fond de faible volatilité qui s’appelle optimum et qu’on représente chez nous par un bel éléphant)
Elle va nous le montrer par la suite par ce qu’il est vraiment beau.
Il est vraiment beau. Et il a des performances très intéressantes, assez exceptionnel par ce que c’est un fond DICI 2. C’est-à-dire qu’il a une volatilité à 5 ans inférieure à 2. Donc très basse. Et avec des performances qui sont plus qu’acceptables puisqu’historiquement on est aux alentours de 3.5%. Mais tout ça pour dire que, quand on regarde la vol, il y a ce type de fond… c’est tellement bas et c’est piloté donc là c’est différent.
A l’heure actuelle il y a certains types d’actifs par exemple les Small caps qui ont des volatilités très basses alors que c’est très risqué. C’est complètement contre intuitif, simplement parce qu’on est sur une phase où les marchés n’ont pas eu de fortes secousses depuis un moment. Donc la volatilité est complètement biaisée.
Attention par contre quand on regarde le couple rendement-risque des fonds. Par exemple ROC (qui est là) a une surperformance par rapport à une volatilité beaucoup plus basse que celle de notre indice de référence. Dû aux qualités intrinsèques des valeurs et de la gestion qui sont basées sur une forte diversification, qui à son tour est basée sur des actifs de qualité. C’est aussi le job de nos clients qui sont souvent des sélectionneurs de fonds, de vérifier, de regarder et d’apprécier la valeur d’un fond en fonction de ses critères.
Maintenant une question peut-être plus pragmatique, quelle est la journée type d’une gérante actions ?
Chez Trusteam on commence avant tout par se renseigner sur l’actualité des valeurs,. Donc le matin on est aidé par les brokers qui nous envoient leurs recherches. Il faut lire l’actualité dans les journaux. Mais il faut aussi ne pas se laisser enfermer par toutes ces news qui arrivent, qui nous bombardent. Et prendre un peu du recul.
Moi j’aime bien regarder des newsletters qui sont un peu différentes. Par exemple des newsletters un peu plus Tech ou qui viennent d’ONG, qui viennent d’acteurs qui ont une autre vision sur les entreprises. Il ne faut pas se laisser enfermer dans une bulle où on oublie quelle est la réalité. Mais avant tout, première étape : s’informer avant de pouvoir checker les portefeuilles et les variations du marché. Regarder par rapport à cette réalité notre perception de celle-ci, la perception du marché, et voir si il y a des opportunités pour investir.
Une fois cette routine du matin accomplie on peut commencer à analyser les valeurs en regardant les rapports annuels. Le détail de la communication des sociétés, les bilans, les comptes résultats. Remplir des outils internes propres d’analyse financière. Ensuite, rencontrer les entreprises. C’est très important d’aller voir les gestions des entreprises concurrentes, essayer de voir les clients et les fournisseurs. Sortir encore une fois de sa bulle pour voir l’ensemble des entreprises.
La question que je me pose c’est quand tu vas voir une entreprise qu’elle fasse partie ou pas de ton portefeuille, la personne en face va forcément te dérouler le tapis rouge enfin en tout cas te dire que tout va bien et essayera de te donner une image plus que positive de sa boite, comment fais-tu pour lire entre les lignes ou te faire une idée ?
Il y a deux choses. La première, être conscient que c’est un jeu, que lui son jeu c’est effectivement de nous donner que des choses positives. Et que notre rôle en ayant préparé et en ayant fait notre job est d’arriver à confronter ses points de vue. La deuxième, je pense que l’honnêteté des dirigeants est très pertinente. Et donc quand ça va mal c’est un critère important qu’ils nous le disent et qu’ils soient transparents là-dessus. Il y a beaucoup d’Asset Managers et beaucoup de gérants, de bons gérants qui prennent ce critère en compte.
On a passé toute la journée là c’est bon ! On a analysé, on a fait des affaires…
Là on arrive à midi, on revient de quelques meetings. Il y a quand même un point très important celui d’aller voir les clients et de les rencontrer pour encore une fois garder pied dans la réalité, savoir pourquoi on travaille et pour qui on travaille…
Ça ne serait pas plutôt le job des commerciaux ?
Les commerciaux entretiennent la relation, ils vont être au quotidien à prendre les rendez-vous, suivre les attentes, voir comment évoluent les clients, et les conseiller. Notre job en revanche est d’expliquer ce qu’on fait, c’est un travail pour moi à double sens, car à chaque fois qu’on va réexpliquer ce qu’on fait, ça voudrait dire qu’on va s’engager et que lorsqu’on va prendre une décision de gestion on pensera au client qu’on a rencontré, et cette notion de responsabilité est hyper importante.
Donc il y a quand même du lien humain dans tout ça, c’est essentiel, il y a beaucoup de prise d’information, d’analyse, et finalement l’aspect sur les marchés d’achat/vente est très limité, quand vous rentrez dans une position, vous allégez, vous passez les ordres…. mais finalement vous faites très peu de trading…
On fait très peu de trading.
Voilà c’est ça la différence majeure.
Ça dépend des gérants mais en tout cas chez Trusteam ce n’est pas notre philosophie, on a une philosophie d’investisseurs long terme, où on essaye un maximum de connaitre la société et d’avoir une position long terme tout en créant de la performance pour nos clients en profitant des irrationalités du marché.
Alors tu m’as parlé au début des biais potentiels des gérants. Justement il y a un mode de gestion à la mode en ce moment qui est la gestion passive, qui nous vient des États-Unis avec tout ce qui est ETF, fonds indiciels, etc. Ils se basent sur des recherches académiques expliquant que sur le très long terme il n’y a aucun gérant qui puisse battre un indice, ou le marché, ou autre, qu’en penses-tu ? Quel est ton point de vue par rapport à ça ?
Moi je suis une gérante active, convaincue. Et d’autant plus que je suis un gérante ISR. Donc je pense que la première de mes responsabilités est de connaitre les sociétés, les suivre. Rendre des comptes à mes clients et aussi faire évoluer les pratiques. Donc influer, avoir un dialogue avec les sociétés. Et que les sociétés puissent savoir qu’on est des investisseurs responsables et qu’elles ne sont pas un numéro quelque part. Et que derrière ces sociétés il y a bien des salariés, il y a bien des clients et donc un monde enfin une réalité.
Sur la polémique en termes de perf, je pense qu’encore une fois ça dépend des types de marchés. Il faut faire attention parce qu’il y a des comportements très moutonniers. On a vu que les ETF et la gestion passive accentuent les mouvements et la volatilité. Lorsque tout le monde achète, tout le monde achète et quand tout le monde vend, tout le monde vend. On peut aller même plus loin jusqu’aux robots d’intelligence artificielle qui sont censés aller contre les biais de la gestion active et qui finalement peuvent renforcer d’autres biais. Comme par exemple, les biais de paniques, les biais de conduite irrationnelle parce que ça ne fait qu’amplifier les mouvements.
Maintenant on arrive un peu à la fin, et pour les gens qui nous regardent qui ont un PEA qui ont des titres, qui s’amusent ou pas, ou le font plus ou moins sérieusement, justement c’est là peut-être un souci, moi aussi j’ai un PEA j’essaye de sélectionner des actions c’est vrai que ça a un côté assez amusant et intéressant, aurais-tu deux ou trois conseils à nous donner, comment faire pour optimiser au mieux ?
Moi j’aurais tendance à dire que c’est un métier, et qu’il faut y passer du temps, c’est vrai qu’on s’en rend compte souvent quand on essaye de le faire soi-même. Mon conseil est de faire attention parce que ça prend du temps et qu’il faut en consacrer suffisamment, et si on n’en a pas il y a des gens qui sont là pour vous, pour vous conseiller. Etre géré n’est pas forcément une mauvaise idée. Mais si jamais on veut y dédier du temps, il faut bien avant tout se focaliser sur les fondamentaux d’une entreprise qu’on connait, dans un secteur qu’on connait.
Cette connaissance est très importante
et ne pas suivre des modes, mais d’essayer de voir pourquoi est-ce que moi je connais quelque chose que quelqu’un d’autre ne connaitrait pas, et que moi je connaitrais mieux. Donc revenir à l’analyse fondamentale des sociétés, quitte à avoir un nombre limité de sociétés pour un investisseur particulier, et après diversifier avec des fonds, car encore une fois il faut beaucoup de temps, et selon mon point de vue vaut mieux avoir un nombre limité de sociétés qu’on connait bien, qu’on suit et après diversifier avec des fonds plutôt que d’essayer de toucher à tout.
D’ailleurs on le voit avec beaucoup de nos clients privés qui reviennent parce qu’ils ont essayé de tout faire eux même et qui ont malheureusement perdu. Nous ne sommes pas des surhommes au contraire c’est simplement notre job, on le fait toute la journée. Sans oublier que dans la gestion privée il y a des règles de bon sens à connaitre. Qu’un gérant privé connait et des situations qu’il a vues dix mille fois. Il sera donc mieux à même de pouvoir les gérer que quelqu’un qui va être confronter à ces mêmes situations une ou deux fois dans sa vie. Il vaut finalement mieux être géré ça peut faire gagner plus d’argent en tout cas en perdre moins, que d’essayer de tout faire par soi-même.
Ça prend du temps et les potentiels frais en plus sont vite compensés.
Par les pertes qui n’ont pas été encore réalisées et aussi par le stress. Car beaucoup de clients me disent merci parce qu’ils n’ont plus à s’en occuper. Donc savoir gérer son stress face à l’argent, c’est compliqué.
Une autre question, concernant cette gestion personnelle, je sais qu’il y a une stratégie que tout le monde aime bien, celle des dividendes, est-ce que ça suffit que j’achète du Total ou des financières avec des rendements à 4%-5%, donc là c’est facile, j’achète et j’attends !
Attention parce que derrière il y a les dividendes d’accord. Mais après il y a quand même le capital et le cours de l’action. Et parfois un rendement trop élevé sur une valeur peut cacher des risques inhérents, intrinsèques à la valeur qu’on a pas analysés. Et qui vont faire que le dividende va être coupé ou arrêté. Cette stratégie de rendement elle ne sera donc pas forcément pérenne. Il faut quand même toujours revenir aux fondamentaux, attention encore une fois, attention !
Attention aux forts dividendes, OK ! Une dernière question que je pose souvent, que ma femme me pose tous les matins, qui est militante engagée bien sûr, qui me demande à quoi je sers et j’ai du mal à lui répondre d’ailleurs, je te pose la question, à quoi sers-tu ?
A quoi je sers ? Le matin quand je me réveille je me pose aussi un peu la même question, et c’est pour ça que je suis venue chez Trusteam. C’est pour ça que je suis devenue investisseur, que je suis devenue gérante ISR. Je sers et je l’espère à rendre le monde un peu meilleur en rappelant tous les jours aux entreprises que ce qui est important c’est le client.
Et qu’elles sont là pour une chose : répondre aux attentes de leurs clients, les satisfaire, les écouter, changer leurs produits en fonction de l’évolution de leurs attentes, et qu’en étant centrées sur leurs clients elles-mêmes contribuent à une mission celle de rendre le monde un peu meilleur. Et je suis profondément convaincue qu’en promouvant la satisfaction client et les bonnes pratiques de satisfaction client, je vais aider à rendre ce monde un petit peu meilleur et c’est central.
Donc vous avez compris que si vous avez un petit business, il faut vraiment se focaliser sur les clients. D’ailleurs n’hésitez pas à mettre des commentaires sur la vidéo, si vous avez aimé ou pas aimé la vidéo pour que moi je puisse bien sur évoluer là-dedans.
Et que moi je puisse aussi être à votre écoute.
Si vous avez des questions pour Claire n’hésitez pas. Claire Berthier merci beaucoup. On va vous montrer l’éléphant comme promis. Si vous avez aimé cette vidéo n’oubliez pas de la liker et puis abonnez-vous à la chaine. Voilà donc le zèbre de Trusteam et l’éléphant de Trusteam.
L’éléphant d’optimum.
MARC – Bonne performance et faible volatilité.
CLAIRE BERTHIER – Et le zèbre c’est savoir se détacher du troupeau pour aller manger l’herbe verte sans se faire manger par le lion.